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Rendu
apte à servir
Parmi les récits
de l'Ancien Testament décrivant la formation d'un serviteur, l'histoire de Josué
est d'une instruction particulière. Elle relate ce qui concerne ce serviteur dès
le début de sa carrière, mais aussi la façon dont Dieu s'en occupe et la manière
de faire de Moïse auquel Josué devra succéder. Il y a matière à réflexion,
aussi bien pour les jeunes qui souhaitent être utiles au Seigneur que pour les
aînés qui désirent le bien de la jeune génération. Nous verrons
successivement les diverses phases du développement et de la préparation du
futur conducteur du peuple en les appliquant à nos conditions. Première
mention, première victoire (Ex. 17. 8-16)
Deux mois à
peine se sont écoulés depuis la sortie d'Egypte. Un ennemi se présente déjà
pour arrêter la marche du peuple à travers le terrible désert, c'est Amalek
qui tombe sur les faibles, sur les traînards (Deut. 25. 18). Le peuple n'était
pas encore entraîné à la guerre, et nul n'avait encore fait ses preuves pour
être promu chef d'armée. Conduit par l'Esprit de Dieu, Moïse désigne Josué
et lui demande de rassembler une troupe de combattants pour engager la lutte
contre Amalek. Moïse n'exige
pas un certificat de capacité de Josué. Il ne le laisse pas non plus sans
ressource, car il se tiendra lui-même sur la montagne avec la verge de Dieu
dans sa main, symbole de la puissance divine en jugement contre les ennemis. On ne voit pas
Josué discuter l'ordre reçu ou argumenter au sujet de son inexpérience. La
foi n'agit pas sur la base d'un mérite personnel, ni ne se retranche derrière
une incapacité. Elle s'appuie sur Dieu seul, sans prétention et sans fausse
humilité. La victoire
accordée à Josué est due moins à une bonne stratégie et à la vaillance des
hommes qu'à l'intercession de Moïse dont les mains sont restées fermes jusqu'à
la défaite de l'ennemi. Nos combats ne
sont pas contre le sang et la chair, mais contre Satan et ses agents (Eph. 6.
10-17). Par nous-mêmes, nous sommes trop faibles pour obtenir la victoire. Mais
n'en prenons pas prétexte pour abandonner la lutte. Notre Seigneur a déjà
vaincu Satan et le monde et, par son intercession, il veut nous rendre
vainqueurs avec lui. Encourageons-nous donc les uns les autres, soutenant aussi
les plus jeunes dont les luttes sont souvent ardues. Le combat subsistera
jusqu'au bout, mais la victoire est assurée à la foi, c'est la victoire de
l'amour (1 Jean 5. 4). Dans l'intimité
de la tente d'assignation (Ex. 33. 11)
Josué a
accompagné Moïse sur le mont Sinaï (Ex. 24. 12-14). Quarante jours plus tard,
ils en redescendent avec les deux tables de la loi dans les mains de Moïse. Les
clameurs du peuple font croire à Josué qu'il s'agit d'un bruit de guerre (Ex.
32. 17), mais ce n'était que celui d'une foule en délire qui acclamait le veau
d'or, son idole. Dans une sainte colère, Moïse brise les deux tables de la loi
: comment aurait-il pu les présenter au peuple sans que celui-ci soit jugé immédiatement
? Après
l'intercession de Moïse et la destruction du veau d'or, une tente est dressée
"hors du camp, loin du camp" (Ex. 33. 7). Appelée la tente
d'assignation (ou de la rencontre), elle anticipe ce que sera le tabernacle, un
lieu de rencontre avec le Dieu saint. Dieu sanctifie ce lieu, faisant apparaître
la nuée devant son entrée. Dans l'intimité
de cette demeure, Moïse s'entretient avec l'Eternel comme dans une conversation
entre deux amis. Allant et venant de la tente au camp d'Israël, Moïse remplit
une noble fonction en faveur de ce peuple rebelle (Deut. 33. 5), mais Josué,
encore jeune homme, ne sort pas de l'intérieur de la tente. L'intimité entre
Dieu et son serviteur Moïse, ainsi que l'atmosphère bénie de ce sanctuaire,
marqueront Josué de façon indélébile jusqu'à la fin de ses jours. C'est dans la présence
du Seigneur que le jeune homme et la jeune fille seront rendus aptes à servir
quand ils y seront appelés. La lecture personnelle de la Parole de Dieu est
primordiale. La recherche de la communion avec d'autres croyants dans l'assemblée
pour écouter ensemble ce que dit le Seigneur et pour s'unir aux prières est
tout aussi importante. Ces deux éléments sont les conditions d'un heureux
accroissement spirituel. Excès de zèle
(Nomb. 11. 28)
Quelques mois
plus tard, alors que le tabernacle est construit et que le peuple franchit une
nouvelle étape vers le pays promis, des difficultés apparaissent : le peuple
se plaint, convoite et se rebelle (Nomb. 11. 1-6). Moïse se décourage et
demande à l'Eternel de le soulager de la charge de ce peuple qui murmure. La réponse
de Dieu est pleine de grâce : il lui accorde 70 collaborateurs auxquels il
pourra déléguer une partie de ses responsabilités (Nomb. 11. 17). Pour être
capables de remplir leur fonction, ces hommes reçoivent une partie de l'esprit
de puissance qui était sur Moïse. Parmi les
personnes choisies pour soulager Moïse, deux hommes, Eldad et Medad, restent au
milieu du camp au lieu de venir à la tente de la rencontre. Ils sont eux aussi
saisis par l'Esprit de Dieu, car l'Eternel les avait désignés. L'ayant appris,
Josué interpelle Moïse : "Mon seigneur Moïse, empêche-les" (v.
28). Moïse alors répond à Josué : "Es-tu jaloux pour moi ? Ah ! que
plutôt tout le peuple de l'Eternel fût prophète ; que l'Eternel mît son
Esprit sur eux !" (v. 29). Il n'y a aucun
doute que Josué ne soit rempli de zèle pour Dieu. Mais voir deux hommes qui ne
sont pas là où Dieu les veut suscite chez lui un sentiment blâmable. Jaloux
du privilège que l'Eternel accorde à ceux qui lui obéissent, il veut bien que
ce privilège soit donné à d'autres, mais à condition qu'ils partagent aussi
la même obéissance. Or la grâce de Dieu déborde de beaucoup les limites que
nos esprits ont tendance à lui assigner. L'obéissance nous est demandée, et
Dieu la récompense. Mais il est libre d'utiliser qui il veut à son service ;
gardons-nous d'y mettre obstacle. L'épisode de
l'homme qui chassait les démons au nom de Jésus sans s'unir au groupe des
disciples relève du même principe. Jésus doit alors dire à Jean : "Ne
le lui défendez pas, car celui qui n'est pas contre vous est pour vous"
(Luc 9. 49-50). A une autre occasion, Jésus dit : "Celui qui n'est pas
avec moi est contre moi, et celui qui n'assemble pas avec moi disperse"
(Luc 11. 23). S'il s'agit d'un groupe, celui qui n'est pas contre est pour, mais
s'il s'agit du Seigneur, celui qui n'est pas pour est contre. A deux contre
tous (Nomb. 14. 6-10)
Israël est enfin
parvenu à la limite du territoire promis par Dieu. "Monte et prends
possession" lui dit Moïse (Deut. 1. 8). Sur la demande du peuple et aussi
sur l'ordre de Dieu (Deut. 1. 22 ; Nomb. 13. 2-3), douze espions sont envoyés
pour explorer le pays, dont Josué. Le rapport de l'expédition est fait à Moïse
et à tout le peuple. Alors que dix espions mettent l'accent sur les difficultés
que représentent les murailles des villes et la grandeur des géants (Nomb. 13.
32-34), Josué et Caleb soulignent la beauté du pays et la puissance de
l'Eternel. Ces deux fidèles témoins ne craignent pas d'affronter la colère de
tout le peuple. Dieu rend alors ce beau témoignage : "Ils ont pleinement
suivi l'Eternel" (Nomb. 32. 12). Il faut en effet
un courage peu ordinaire pour se déclarer ouvertement pour Dieu quand la masse
s'y oppose avec violence. L'expédition réalisée en pays ennemi avait comporté
moins de risques que leur retour parmi leur peuple, car ils sont maintenant
menacés d'être lapidés. D'autres après
eux ont fait les mêmes expériences : David dans le désert de Ziph (1 Sam. 23.
19-23), Elie sur le Carmel (1 Rois 18. 21-22), Paul à la fin de son ministère
(2 Tim. 1. 15 ; 4. 16). Aucun d'eux n'était vraiment seul, car Dieu ne les a
pas abandonnés. Mais notre Sauveur a été placé au centre de la haine de
l'homme, plus encore, il a été abandonné de son Dieu. Et c'était pour moi...
Transmission des
pouvoirs (Deut. 3. 28)
Quarante années
se sont écoulées depuis la sortie d'Egypte. Moïse reçoit l'ordre de préparer
son successeur, car lui-même ne pourra pas entrer dans le pays promis. Il en
est affligé, car ce pays est vraiment désirable. Mais soumis à l'ordre divin,
il prend Josué et lui donne toutes les instructions utiles pour diriger le
peuple. Dieu lui avait dit : "fortifie-le" (Deut. 1. 38 ; 3. 28), de
sorte qu'il s'acquitte de ce service avec fidélité. Par sept fois, dans le
livre du Deutéronome, Josué est mentionné en rapport avec le mandat que Moïse
lui a confié de la part de l'Eternel. Le vieux
serviteur ne se soustrait pas à sa responsabilité envers le plus jeune ; au
contraire, il encourage et stimule Josué. Elie a agi de même avec Elisée.
Lorsque celui-ci lui demande une double mesure de son esprit, Elie la lui
accorde à la seule condition qu'il reste en contact avec lui jusqu'à la fin (2
Rois 2. 9-10). L'apôtre Paul suit le même exemple quand il prend congé de
Timothée en lui écrivant sa dernière épître (2 Tim. 1. 6, 7, 13, 14). Vision prophétique
(Deut. 32. 44)
Josué, encouragé
et fortifié, est bien préparé pour conduire le peuple dans la conquête du
pays promis. Il connaît les ennemis qu'il rencontrera et leur puissance. Il
s'appuie fermement sur Dieu dont il a éprouvé la fidélité. Il a vu aussi le
peuple rebelle mourir dans le désert à cause de sa désobéissance, tandis que
lui et Caleb sont demeurés en vie. Plein de l'énergie que lui donne l'Esprit
de Dieu, il pourrait tomber dans un optimisme exagéré. Comment alors serait-il
capable d'affronter les crises et les défaites qui surgiront inévitablement ? Dieu ne veut pas
laisser son serviteur s'illusionner sur l'avenir d'Israël, c'est pourquoi le
cantique prophétique que Moïse enseigne au peuple est aussi prononcé par Josué.
Sans entrer dans les détails de ces paroles, notons d'abord la proclamation de
la grandeur de l'Eternel (v. 3 et 4). Soulignons aussi la fréquente répétition
du mot "Rocher" utilisé comme titre de Dieu. L'expression "le Même"
apparaît pour la première fois dans l'Ecriture (v. 39) ; elle traduit
l'immutabilité de Celui qui s'occupe de son peuple au travers de tous les aléas
de son histoire. Malgré la rébellion d'Israël (v. 15-30), Dieu déclare qu'il
se repentira en faveur de son peuple et exécutera la vengeance contre ses
adversaires (v. 36, 41, 43). Si la nouvelle génération
doit vivre encore plusieurs années avant la venue du Seigneur, elle doit être
consciente que l'état du monde n'ira pas en s'améliorant (2 Tim. 3. 1-5, 13 ;
4. 3,4). La parole de Dieu le dit à l'avance, non pour nous épouvanter, mais
pour nous avertir et nous prémunir. Notons les "mais toi..." qui
jalonnent les chapitres 3 et 4 de cette dernière épître de Paul. Dieu est fidèle
à ses promesses et il n'abandonnera pas les siens. Maintenant, lève-toi
(Jos. 1. 2)
Le grand législateur
n'est plus. Il a été le berger d'un peuple souvent indocile et il l'a porté
sur son coeur dans un service d'intercession remarquable. Qu'adviendra-t-il
maintenant ? Le successeur de Moïse se montrera-t-il à la hauteur de sa tâche
? Pour le stimuler encore, l'Eternel dit à Josué, à trois reprises :
"Fortifie-toi et sois ferme" (Jos. 1. 6, 7, 9). En ajoutant : "Je
serai avec toi, je ne te laisserai point et je ne t'abandonnerai point",
Dieu lui fournit toutes les ressources indispensables pour accomplir son
service. Il ne reste à Josué qu'à s'engager pleinement et à assumer ses
responsabilités : "Moïse, mon serviteur est mort ; et maintenant, lève-toi,
passe ce Jourdain, toi et tout ce peuple" (v. 2). Le temps de la préparation
est accompli. Il ne reste qu'à obéir et aller de l'avant, avec l'aide de Dieu.
Josué se soumet sans hésitation ; il écoute la parole que Dieu lui adresse et
la transmet au peuple entier (v. 10-11). Ainsi devrait-il en être chaque fois
qu'une nouvelle génération prend le relais. Elle a des exemples devant elle,
mais surtout Celui sur qui se sont appuyés ses prédécesseurs. Il est fidèle
et ne change pas (Hébr. 13. 7, 8). F. Gfeller |
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