échanges

bimestriel

Precedente ] Remonter ] Suivante ]

Les sentiments de Jésus
dans l'évangile selon Marc

Nous avons peu de contrôle sur ce qui se passe autour de nous. Nos réactions aux événements de la vie semblent refléter des expériences antérieures ou nos attentes. Que ressentons-nous quand nous rendons visite à des personnes malades dans un hôpital ? Qu'est-ce qui nous touche quand nous sommes en face de la vraie pauvreté et de la misère en regardant la télévision ? Comment réagissons-nous quand des chrétiens agissent d'une manière différente de la nôtre ? Nos réactions émotives dans de telles circonstances mettent à jour notre système de valeur. Mais quels sentiments Jésus a-t-il lui-même manifestés ?

Des quatre évangélistes, Marc est peut-être celui qui relate au mieux les émotions de notre Seigneur Jésus. Elles ouvrent une fenêtre sur son cœur. Elles nous montrent ce qui était important pour lui et ce qu'il désapprouvait.

1. Jésus agit envers les nécessiteux

Le premier chapitre de l'évangile selon Marc se termine par la scène d'un lépreux qui tombe aux pieds de Jésus et le supplie : "Si tu veux, tu peux me purifier" (1. 40). Jésus est "ému de compassion", non d'une pitié superficielle juste suffisante pour tendre une pièce de monnaie à un malheureux. Ce qui suit n'est pas une parole froide ou calculée, mais un geste mu par la compassion : "Jésus, étendant la main, le toucha, et lui dit : Je veux, sois purifié !" (1. 41). A une autre occasion, il rencontre "un sourd qui parlait avec peine". Les personnes qui l'ont amené demandent à Jésus de le guérir. Le Seigneur comprend la triste situation de ce sourd et l'angoisse de ses amis. Il regarde vers le ciel, soupire, et lui dit : "Ouvre-toi !" (7. 32-35). Il est pénible de vivre dans ce monde déchu ! Notre Seigneur a également éprouvé cette souffrance.

Plus un groupe de personnes est grand, plus les besoins sont nombreux. Nous lasserions-nous d'y répondre ? Jésus emmène ses disciples dans un endroit tranquille pour qu'ils se reposent. Ils méritent bien ce repos après tout ce qu'ils ont fait et enseigné (1. 30). Pourtant une grande foule les suit...Jésus se rendait compte que beaucoup le suivaient par curiosité et pour des avantages personnels. Comment agit-il ? Il est "ému de compassion envers eux, parce qu'ils étaient comme des brebis qui n'ont pas de berger" (6. 31-34). Il comprend leurs besoins matériels et spirituels, il les enseigne et les nourrit.

Passons-nous par une période difficile de notre vie ? Jésus a connu les douleurs, les frustrations et les injustices de la vie dans ce monde déchu. Son cœur s'émeut en prenant connaissance de chacun de nos besoins.

2. Jésus agit envers les possédés de démons

L'évangile selon Marc est un évangile d'action. Mais chaque action provoque une réaction. L'opposition à Jésus et à son œuvre est mentionnée dans chaque chapitre de cet évangile, excepté dans le chapitre 13 qui est prophétique. Cette opposition provient fondamentalement de deux sources : l'activité de Satan et celle des technocrates religieux. Plus que les autres évangélistes, Marc décrit à plusieurs reprises l'activité de Satan et des démons : Satan tente Jésus ; à une occasion, il s'exprime par Pierre ; les esprits impurs parlent, crient, secouent des personnes, etc.

Nous sommes peu familiers avec ces phénomènes de possession. Avec la migration rapide des personnes du tiers monde, les chrétiens qui s'engagent à aider et à évangéliser les émigrés rencontreront tôt ou tard ce genre de manifestations. Ce n'est qu'après avoir gagné notre confiance que ces émigrés commenceront à parler de ces phénomènes. Comment vivrons-nous cela ? Comment notre Seigneur Jésus l'a-t-il ressenti et a-t-il agi ? Il manifestait sa miséricorde envers les hommes possédés par des démons (5. 19), et son ministère de libération n'a pas passé inaperçu. Certains ont parlé d'une "nouvelle doctrine" ou d'un "nouvel enseignement" (1. 25-27). D'autres, qui le rejetaient mais ne pouvaient nier les effets positifs d'une délivrance, ont déclaré que Jésus lui-même avait un esprit impur (3. 22, 30).

Malgré mon expérience limitée dans ce domaine, je pense que la miséricorde est la force qui entraîne à nous impliquer (non la curiosité, ni l'amour de la polémique). En fait, il faut un sentiment profond de compassion pour aider ceux qui souffrent d'asservissement spirituel à trouver la liberté complète en Christ. Ce ministère est loin d'être aisé !

3. Jésus agit envers les technocrates religieux

Nous trouvons un large éventail de la vie religieuse juive dans cet évangile. Marc mentionne les sacrificateurs, les principaux sacrificateurs, les pharisiens, les scribes, les sadducéens, les anciens, les hérodiens. Chacun avec son penchant théologique, mais tous unis pour s'opposer à Jésus. Au début de l'évangile, leur opposition est principalement d'ordre théologique : ils examinent et jugent Jésus sur des questions telles que "qui peut pardonner les péchés" (2. 7), "pourquoi mange-t-il et boit-il avec les publicains et les pécheurs" (2. 16), pourquoi ses disciples ne jeûnent-ils pas (2. 18), que faire ou ne pas faire un jour de sabbat (2. 24) ?

Un jour de sabbat, Jésus rencontre un homme malade. Va-t-il attendre un autre moment pour le guérir et ainsi éviter une confrontation inutile avec les Juifs inflexibles ? Jésus ne nie pas que la loi du sabbat a été donnée par Dieu, mais il se réfère à la raison de cette loi pour justifier ses actes de délivrances les jours de sabbat : "le sabbat a été fait pour l'homme, non pas l'homme pour le sabbat" (2. 27). "Il leur dit : Est-il permis de faire du bien le jour de sabbat, ou de faire du mal ? de sauver la vie, ou de tuer ?" Les Juifs sont restés silencieux. Qu'a pensé Jésus de l'attitude de ces technocrates religieux, de ces propres justes ? Il les regarde avec colère, "étant attristé de l'endurcissement de leur cœur" (3. 5). Ce sont des sentiments très forts. Puis, devant leurs yeux réprobateurs, il guérit l'homme.

Les pharisiens se sont sentis menacés par le comportement de Jésus. Ils tiennent conseil avec les hérodiens (l'aile politique des Juifs religieux) pour le faire périr (3. 6). L'élimination des insoumis est la réponse classique des technocrates frustrés.

L'opposition à Jésus augmente. Ses ennemis commencent à le discréditer : ils l'accusent d'être possédé par Béelzébul (3. 22). Ils le suivent avec, dans une main, la loi donnée par Dieu et dans l'autre leurs traditions (" nous l'avons toujours fait de cette façon "). Ils analysent tout ce que Jésus fait, dit ou permet. Un jour, quelques disciples de Jésus commencent à manger sans s'être lavés les mains. Bien entendu, c'est bien de se laver les mains, mais ces technocrates en avaient fait une loi.

Marc consacre 23 versets (7. 1-23) pour donner la perspective de Jésus sur la souillure : rien de ce qui vient du dehors et qui pénètre dans l'homme ne peut le rendre impur. Au contraire, c'est ce qui est à l'intérieur de l'homme qui le souille. La réalité interne est toujours plus importante que les choses externes.

Cherchant des preuves pour accuser et juger Jésus, ils l'interrogent au sujet du divorce (10. 2) et de la légitimité des impôts à un César païen (12. 14). Le Seigneur ne refusait pas les questions. C'est leur attitude de jugement et d'hypocrisie qui le frustrait. Puisqu'ils avaient décidé que Jésus n'était pas le Christ, rien n'allait changer leur position. Au lieu d'être reconnaissants et de se réjouir que Jésus ait nourri 4000 personnes, les pharisiens viennent l'examiner : ils lui demandent un signe du ciel. "Soupirant profondément en son esprit", Jésus refuse de leur accorder leur demande. Les laissant, il remonte dans la barque et part pour l'autre rive (8. 11-13). Jésus a résisté à ces pharisiens puis s'est éloigné d'eux. Peut-être un exemple instructif sur la façon de traiter avec des technocrates religieux endurcis !

L'état d'esprit légaliste est contagieux. Comme un champignon parasite, il se propage très rapidement. Dans la barque, Jésus met en garde sévèrement ses disciples : "Attention ! Gardez-vous du levain des pharisiens" (8. 15). Nous devrions également prendre cet avertissement très au sérieux.

4. Jésus agit envers ceux qui cherchent sincèrement

Jésus quitte la Judée avec ses disciples et un jeune homme accourt vers Lui. Comme les pharisiens et les scribes, il a également quelques questions à lui poser. Mais son état d'esprit est différent. Il cherche à apprendre, non à examiner, à juger ou à rivaliser. Comme les pharisiens, il adhère à la loi depuis son enfance. On trouve, chez lui, une grande ardeur à obéir, dirigée par un cœur sincère. Notre Seigneur Jésus repère cette différence importante. S'il ressentait une colère et une détresse profonde envers les pharisiens, Jésus a regardé et aimé ce jeune homme. Tranquillement, il le rend attentif à l'état de son cœur : certes il est sincère, mais sans besoin. Sa recherche manquait d'un sentiment nécessaire pour aboutir, un sentiment d'incapacité. Son obéissance aux formes extérieures avait asséché sa soif de réalité.

Une grande partie de sa sécurité et de sa propre estime reposait, en actualisant, sur ses économies, ses valeurs immobilières, son plan de retraite. Le Seigneur lui montre qu'il faut choisir : "Vends tout ce que tu as...et viens, suis-moi" (10. 17-22). Le message est clair : suivre des règles, garder les traditions avec beaucoup de zèle peut conduire à se croire en règle avec soi, mais le Seigneur cherche quelque chose de plus profond. La passion qui anime notre cœur est ce qui importe vraiment. Une passion orientée par Dieu dispose à tout donner.

Deux chapitres plus loin, Jésus rencontre un scribe qui réfléchit. Le scribe lui demande quel est le commandement le plus important de tous. Le dialogue qui suit montre que ce scribe était différent de la plupart de ses amis religieux. Derrière les formes et les choses extérieures données par Dieu, il montre qu'il reconnaît la suprématie de la réalité spirituelle quand il résume en une formule ce que Jésus vient de lui dire : aimer Dieu et son prochain a beaucoup plus de valeur que tous les rites réunis. Je suis convaincu que le Seigneur doit l'avoir regardé et aimé quand il lui dit : "Tu n'es pas loin du royaume de Dieu" (12. 28-34).

Malheureusement, comme la plupart des pharisiens, nous sommes enclins à défendre et à exalter les formes et les procédures. Les structures et les traditions rassurent. Elles apportent la continuité mais ne donnent pas, malgré ce que pensent certains, des preuves de spiritualité. Jésus a averti ses disciples de ne pas mettre l'accent sur les choses extérieures (12. 38-40).

Ne soyons jamais satisfaits par des formes extérieures, aussi conformes à la Bible soient-elles. Notre passion devrait être celle de l'apôtre Paul : "le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances, étant rendu conforme à sa mort" (Phil. 3. 10). Jésus aime ceux qui le recherchent avec sincérité.

5. Jésus et le coût de la rédemption

L'auteur de l'épître aux Hébreux nous encourage à fixer "les yeux sur Jésus, lui qui... à cause de la joie qui était devant lui, a enduré la croix, ayant méprisé la honte, et est assis à la droite du trône de Dieu" (Héb. 12. 2). Jésus pouvait anticiper avec joie le fruit de ses souffrances. D'une manière étonnante, cette joie divine provient de la rédemption de personnes étranges, problématiques, inconséquentes, comme vous et moi. Mais qu'est-ce que Jésus a ressenti face à la douleur et à la réalité de la croix ? "Ils viennent en un lieu dont le nom était Gethsémané. Et il dit à ses disciples : Asseyez-vous ici, jusqu'à ce que j'aie prié. Et il prend avec lui Pierre et Jacques et Jean ; et il commença à être saisi d'effroi et fort angoissé. Et il leur dit : Mon âme est saisie de tristesse jusqu'à la mort ; demeurez ici et veillez" (Marc 14. 32-34).

Si nous avons été élevés dans une famille chrétienne, et si nous avons entendu le récit de la Passion à plusieurs reprises, serions-nous devenus insensibles à l'intensité de cette souffrance ? Serions-nous tentés de penser que, puisque Jésus est Dieu, il peut tout faire sans beaucoup d'effort ? L'œuvre de salut n'a pas été un processus facile à accomplir !

Chers croyants, avez-vous jamais été blessés ? N'avez-vous jamais été rejetés ? N'avez-vous été affligés, profondément affligés ? Ceci, et beaucoup plus, a été ressenti par Jésus dans son œuvre de rédemption. Pensez, pour un moment, à Jésus dont l'âme a été saisie de tristesse "jusqu'à la mort". Et ce n'était que le commencement. Pour vous et pour moi, il a poursuivi l'œuvre du salut jusqu'au bout. C'est dire la valeur que nous avons pour lui !

Cet aperçu du cœur de notre Sauveur nous aidera à l'aimer davantage et à estimer davantage un si grand salut.

Conclusion

Jésus se souvient de son temps sur la terre, "car, en ce qu'il a souffert lui-même, étant tenté, il est à même de secourir ceux qui sont tentés" (Héb. 2. 18). Nous avons un Seigneur qui comprend ce que nous ressentons, qui a connu les frustrations de la vie dans ce monde déchu ainsi que la souffrance en subissant les conséquences des péchés d'autrui. Mais il y a plus encore. Si nous suivons Christ (l'esprit de Christ) dans toute notre manière de penser, nous commencerons également à éprouver ses sentiments : sa compassion envers les nécessiteux, sa pitié envers ceux qui souffrent de possession démoniaque, son amour pour ceux qui le recherchent sincèrement, son indignation envers le comportement exclusif et peut-être même sa colère contre nos propres attitudes et pratiques pharisaïques. Si nous pouvions davantage penser et ressentir les mêmes émotions que Christ, nous pourrions nous comporter davantage comme lui.

Extraits adaptés d'un article en anglais de Philip Nunn.
L'article complet peut être obtenu auprès des éditeurs.

Precedente ] Remonter ] Suivante ]

échanges

© 1994-2004

contact