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Tiens-toi debout à la place où tu es

Alors qu'il est très âgé, le prophète Daniel traverse une période d'intenses souffrances spirituelles pour son peuple dont il ne comprend pas la cause profonde. Il jeûne et afflige son âme pendant trois semaines. Au terme de son jeûne, le Seigneur lui apparaît dans une vision et un ange lui dit : "Tiens-toi debout à la place où tu es" (Dan. 10. 11). Daniel reçoit ensuite la compréhension qu'il recherchait et une ultime prophétie qui va jusqu'au temps de la fin. Le prophète sort de cette épreuve avec de nouvelles forces.

Ce récit nous enseigne comment se comporter dans des situations difficiles ou pénibles, avant même d'en connaître toutes les raisons.

Le contexte historique

Lorsqu'il reçoit sa dernière vision prophétique, sous le règne de Cyrus, roi de Perse, le prophète Daniel est un vieillard. Il a vraisemblablement près de 90 ans. Au cours de sa longue vie, Daniel a occupé des postes très importants à la cour des rois à Babylone. Mais il a aussi connu de grandes épreuves. Honoré ou persécuté, Daniel est toujours resté fidèle à Dieu. Sa foi n'a jamais chancelé au milieu d'une population païenne et d'une cour corrompue.

Dieu avait donné à Daniel, alors qu'il était encore très jeune, la faculté d'interpréter les songes. Il avait aussi reçu des prophéties si remarquables qu'elles font de lui l'un des plus grands prophètes. Parvenu à un âge très avancé pour l'époque, Daniel aurait pu penser que son ministère était achevé. Dieu avait pourtant une ultime prophétie à lui communiquer. Par sa précision et sa portée jusqu'à la fin des temps, elle est peut-être la plus admirable (Dan. 11 et 12).

L'épreuve de Daniel

"En ces jours-là, moi Daniel, je menai deuil trois semaines entières ; je ne mangeai pas de pain agréable, et la chair et le vin n'entrèrent pas dans ma bouche ; et je ne m'oignis point, jusqu'à ce que trois semaines entières fussent accomplies" (Dan. 10. 2, 3).

Nous ignorons les circonstances immédiates qui ont jeté Daniel dans une si profonde affliction et l'ont poussé à entreprendre un jeûne aussi long et sévère. On sait que le prophète portait le peuple juif sur son coeur et qu'il était très préoccupé de sa mauvaise condition morale et spirituelle : ce peuple rebelle refusait d'écouter les prophètes que Dieu lui envoyait (Dan. 9. 6). Daniel s'en était profondément humilié devant Dieu quelques années auparavant.

De nouveau dans une réelle affliction, le prophète mène un véritable deuil pendant trois semaines. Avait-il reçu de mauvaises nouvelles des Juifs qui étaient retournés à Jérusalem après le décret de Cyrus, roi de Perse ? Peu nombreux, ils avaient bien commencé à reconstruire le temple, mais leur élan était vite retombé. Leurs adversaires avaient même fait cesser la reconstruction de la maison de Dieu (Esd. 4. 4, 5). Le prophète avait peut-être une autre raison de s'affliger : la plupart des Juifs exilés n'avaient pas voulu retourner en Palestine, la terre que Dieu leur avait donnée. Ils préféraient leurs aises en Mésopotamie à la lutte en Palestine. Quoiqu'il en soit, Daniel traverse une très grande épreuve spirituelle et même physique. Pendant trois semaines, il ne touche à aucun met délicat et il cesse de manger de la viande et de boire du vin. Ce jeûne, très sévère pour une personne aussi âgée que lui, n'était pas gratuit. Au-delà de ses afflictions pour son peuple, le prophète cherchait à comprendre quelque chose qu'il n'arrivait pas à saisir, mais dont la gravité ne lui échappait pas.

Comme un commentateur l'a récemment écrit : "L'exemple du prophète nous enseigne que nous ne pourrons nous identifier avec les afflictions du peuple de Dieu que si nous sommes dans une communion intime avec Dieu. Une préparation morale (figurée par l'humiliation et le jeûne) est toujours nécessaire pour nous rendre capables de recevoir les pensées de Dieu et discerner sa volonté" (Sondez les Ecritures, vol. 8, dont on consultera avec profit le commentaire sur le livre de Daniel).

Une apparition

Quand nous nous humilions pour mieux entrer dans la connaissance des pensées divines, Dieu se plaît à répondre : "Mais c'est à celui-ci que je regarderai : à l'affligé, et à celui qui a l'esprit contrit et qui tremble à ma parole" (Es. 66. 2).

Au terme de son jeûne, Daniel est au bord du fleuve Hiddékel (probablement le Tigre) avec des compagnons. Le 24ème jour du premier mois de l'année, une personne revêtue de gloire lui apparaît dans une vision. Sa description correspond à celle du Fils de l'homme que l'apôtre Jean vit à Patmos (Apoc. 1. 12-16). Comme Jean, Daniel perd toutes ses forces devant l'apparition glorieuse du Seigneur de l'univers et tombe dans une profonde stupeur. Il s'effondre sur le sol. Bien que ses compagnons n'aient pas vu la personne qui était apparue, ils ont couru se cacher. Le prophète reste seul, face contre terre.

Une main touche alors Daniel, le secoue, et le met sur ses genoux et les paumes de ses mains. Dans sa faiblesse extrême, à quatre pattes comme un animal, le prophète entend : "Daniel, homme bien-aimé, comprends les paroles que je te dis, et tiens-toi debout à la place où tu es ; car je suis maintenant envoyé vers toi" (v. 11). A cette parole, Daniel trouve les forces pour se relever et se tenir sur ses pieds. Il est un homme bien-aimé ! Quel encouragement de la part du Seigneur par son ange !

"Ne te réjouis pas sur moi, mon ennemie : si je tombe, je me relèverai ; si je suis assise dans les ténèbres, l'Eternel sera ma lumière" (Mich. 7. 8).

Les raisons de l'épreuve

Pendant trois semaines, Daniel avait cherché à comprendre par la prière et dans l'affliction, sans toutefois obtenir de réponse à ses préoccupations (v. 12). L'ange, venu le secourir, révèle maintenant à Daniel la vraie dimension du combat que le prophète avait livré. Le jour même où Daniel avait entrepris son jeûne, le Seigneur, par son ange, était venu pour lui révéler ce qui arriverait au peuple juif. Mais des forces spirituelles de méchanceté lui avaient résisté. Un conflit avait alors éclaté entre les puissances du bien et du mal dans le monde invisible. L'ange en était sorti vainqueur.

L'enjeu dans des situations difficiles nous dépasse souvent totalement, mais soyons assurés que le Seigneur vient à notre secours dès le premier jour où nous commençons à nous affliger sincèrement devant lui.

Daniel regarde toujours vers la terre, n'osant encore lever les yeux vers celui qui lui parle. Debout, mais manquant de souffle, il devient muet. L'ange touche alors ses lèvres et continue de lui parler. En l'entendant, Daniel reprend des forces et retrouve son souffle : "Que mon seigneur parle, dit-il, car tu m'as fortifié" (v. 19). Daniel reçoit alors une ultime révélation : les forces du mal ne pourront pas détruire complètement le peuple de Dieu, malgré les guerres et les persécutions jusqu'à la fin des temps (Dan. 11 et 12).

Comme Daniel, nous pouvons nous trouver seuls avec nos inquiétudes et nos questions, délaissés par des compagnons, lâchés même par des croyants. Rappelons-nous que l'opposition à l'oeuvre de Dieu ne vient que de "la puissance spirituelle de méchanceté" (Eph. 6. 12), et c'est contre elle que se situe la lutte. Au-dessus de la scène de ce monde, se livre un combat spirituel dont l'intensité nous échappe, mais dont l'enjeu est évident. Par le moyen de l'être humain, le diable et ses agents font tout pour détruire l'oeuvre de Dieu dans le coeur des hommes. Si nous sommes conscients de la nature de ces combats dans le monde invisible, nous nous équiperons en conséquence pour résister et tenir ferme (Eph. 6. 13).

Rester debout à sa place

Le mot d'ordre donné à Daniel nous concerne tous aujourd'hui. Là où le Seigneur nous a placés, nous devons nous tenir debout :

  • Debout dans une société où les valeurs morales du christianisme sont bafouées. Le bien est appelé mal, et le mal est appelé bien. Comme Daniel et ses compagnons quand ils étaient encore jeunes, nous devons refuser de nous laisser contaminer par des styles de vie opposés aux enseignements de la parole de Dieu. Les plaisirs faciles, l'appel aux sens, les déviations sexuelles, toutes ces choses sont tolérées, voire encouragées par les média et beaucoup de nos concitoyens.
  • Debout à l'école, aux milieu de camarades qui n'ont pas d'éducation chrétienne et qui ne comprennent pas dans quel gouffre s'engage la société moderne quand elle prône la liberté totale et la promiscuité.
  • Debout, quand un enseignant cherche à nous influencer dans le domaine moral, politique ou religieux, en nous détournant de la vérité révélée dans la Bible.
  • Debout à notre place de travail, assumant nos responsabilités et accomplissant notre travail avec honnêteté. Il est si facile de se donner de l'importance au dépend des autres ou de discréditer un collègue pour avancer dans la hiérarchie de la compagnie qui nous emploie. "N'accuse pas un serviteur auprès de son maître, de peur qu'il ne te maudisse, et que tu n'en portes la peine" (Prov. 30. 10).
  • Debout dans notre famille, respectant les rôles respectifs des époux, des parents et des enfants. Une famille chrétienne, structurée, vivant dans l'harmonie et la joie est un puissant témoignage à l'ordre de la création et à la sagesse de Dieu. Quelqu'un a dit : "En mettant la crainte de Christ à la base de la vie de famille, l'Evangile fait de la vie de famille le triomphe de la vie chrétienne". Debout, même dans les moments de tension ou de découragement qui existent dans toute famille chrétienne. Debout comme mère de famille, accomplissant jour après jour les mêmes tâches, souvent ingrates. Debout quand on voudrait être ailleurs...
  • Debout à notre place dans l'assemblée locale, aimant les frères et les soeurs et les servant, même quand des différences d'opinion surgissent. Nous avons tous besoin les uns des autres, à l'image de chaque membre et de chaque organe du corps humain (1 Cor. 12. 21). Une vision réductrice du corps de Christ conduit à l'esprit sectaire. Ce qui compte, c'est que chaque vrai croyant soit trouvé fidèle à son poste, exerçant les talents que Dieu lui a confiés et les dons qu'il a reçus. Il est si facile de fuir ses propres responsabilités en s'ingérant dans les affaires d'autrui sous un couvert de spiritualité.
  • Debout pour défendre la foi. Debout pour maintenir avec fermeté ce que Dieu nous a révélé par son Esprit dans les Ecritures. Nous seront jugés sur la base de nos connaissances, pas de nos ignorances involontaires.
  • Debout au milieu de la chrétienté, plus divisée que jamais par des courants de pensées, des "leaders" d'opinion qui prennent leurs propres vues pour limite de l'horizon.

Le programme est vaste ! Nous trouverons la sagesse et les forces pour l'accomplir si, comme Daniel, nous demandons au Seigneur de nous parler (Dan. 10. 19).

M. Horisberger

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