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Il
n'est pas bon que l'homme soit seul
Pour quelle
raison les clubs de vacances sont-ils si populaires et, pour prendre un autre
exemple, pourquoi les chrétiens cherchent-ils à se rassembler ? Y aurait-il
chez l'homme un besoin fondamental de se retrouver avec d'autres personnes ? Dieu n'a pas créé
l'homme pour qu'il vive isolé. Alors qu'Adam venait de sortir des mains de son
Créateur, l'Eternel dit : "Il n'est pas bon que l'homme soit seul. Je lui
ferai une aide qui lui corresponde" (Gen. 2. 18 ). Ce principe est si
fondamental que son application va bien au-delà du couple : nous savons par la
parole de Dieu et par expérience que les croyants ne peuvent pas vivre indépendamment
les uns des autres. Ils appartiennent à une famille, celle de Dieu ; ils sont
les membres d'un seul corps, celui de Christ. Le Seigneur lui-même n'est pas
seul. Dieu lui a donné l'Eglise comme épouse. Dans la gloire à venir, elle
lui correspondra : Christ se présentera "l'assemblée à lui-même,
glorieuse, n'ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable" (Eph. 5. 27). Rien n'est plus
étranger à l'esprit de l'évangile qu'un chrétien ou un groupe de chrétiens
qui s'isole. Aucun croyant ne peut être joyeux s'il se tient volontairement à
l'écart du peuple de Dieu. Les vrais croyants ressentent au plus profond
d'eux-mêmes le besoin de se rassembler pour adorer, prier, méditer la Bible,
servir le Seigneur et s'exhorter mutuellement. Cette nécessité est ressentie
d'autant plus vivement que les épreuves et les difficultés grandissent. Il est
vrai que des chrétiens convaincus ont vécu en ermites pour se consacrer à la
prière et à la méditation. Ne les jugeons pas. Il faut alors un appel
exceptionnel de la part de Dieu. Voyons comment
les hommes ont répondu à la déclaration de l'Eternel : "Il n'est pas bon
que l'homme soit seul", et considérons comment Dieu a accompli son
dessein, en dépit de l'égoïsme et de l'orgueil des hommes, en donnant aux
croyants toutes les ressources nécessaires pour vivre unis ensemble à la
gloire de Dieu. L'esprit de Caïn
Après que Caïn
ait tué son frère, Dieu lui déclare : "Tu seras errant et vagabond sur
la terre". Dans son errance, Caïn est condamné à la solitude. Un
vagabond n'a pas d'ami. Pour défier le jugement de Dieu prononcé sur lui et
sans doute par peur, Caïn bâtit une ville. Il veut protéger ses descendants
de la destruction en les rassemblant dans un même endroit (Gen. 4. 12, 14,17).
Par orgueil, il cherche du même coup à perpétuer la renommée de sa famille
en donnant le nom de son fils à la ville qu'il a bâtie. Lémec, un
descendant de Caïn, ne reste pas seul. Comme son ancêtre, il pervertit à ses
propres fins le principe que Dieu avait établi. Il prend deux femmes, non pas
une comme Dieu l'avait voulu pour l'homme (Gen. 4. 23, 24). Après le déluge,
Nimrod, "puissant chasseur devant l'Eternel", construit des villes et
fonde le premier royaume pour rassembler et dominer sur les personnes qu'il a
assujetties (Gen. 10. 8-12). Les hommes de
cette époque continuent de suivre l'esprit de Caïn, bafouant les principes
divins. Comme Caïn, la peur et l'orgueil les caractérisent. Par crainte d'être
dispersés sur la face de la terre, ils s'assemblent dans la plaine de Shinhar
et bâtissent la ville de Babel avec des briques d'argile, le matériau dont
l'homme a été tiré. Poussés par une même volonté orgueilleuse, ils
construisent une tour pour se faire un nom. On sait comment Dieu a anéanti
l'entreprise de ces hommes qui voulaient vivre ensemble pour exalter leur propre
orgueil (Gen. 11. 1-9). Abraham, le père
de tous les croyants
Tout autre est le
comportement d'Abraham. Dieu l'appelle à sortir de l'idolâtrie, pour en faire
le chef de file d'une nouvelle famille. Parce qu'il a cru Dieu, Abraham devient
le père de tous les croyants. "Regardez à Abraham, votre père, dit
l'Eternel à son peuple, et à Sara, qui vous a enfantés ; car je l'ai appelé
seul, et je l'ai béni, et je l'ai multiplié" (Es. 51. 2). En arrivant en
Canaan, le patriarche plante sa tente entre les villes d'Aï et de Béthel (Gen.
12. 8). Contrairement à Caïn, un vagabond, Abraham reste toute sa vie un pèlerin.
Il ne fuit pas les hommes, ni ne cherche leur protection, sauf quand il s'établit
en Egypte pour éviter la famine. Mais le Pharaon l'en chasse bientôt, et
Abraham revient à Béthel, au "lieu où était sa tente au
commencement" (Gen. 13. 3). Abraham n'a pas
habité dans une ville comme Lot à Sodome pour chercher la sécurité et la
prospérité matérielle. Bien que très riche et puissant, le patriarche n'a
pas construit de ville comme Caïn ou Nimrod, car "il attendait la cité
qui a les fondements, de laquelle Dieu est l'architecte et le créateur" (Héb.
11. 10). La seule chose qu'il bâtit là où il séjourne est un autel pour
adorer l'Eternel (Gen 12. 7, 8). Un seul peuple
En délivrant les
Hébreux, esclaves en Egypte, Dieu voulait former un royaume de sacrificateurs,
une nation sainte (Ex. 19. 6). Selon une expression très imagée de l'Ecriture,
Dieu a trouvé ce peuple dans un pays désert et dans la désolation des
hurlements d'une solitude (Deut. 32. 10). Mais à cause de l'infidélité de son
peuple, Dieu n'a réalisé que partiellement son dessein dans un premier temps.
Les sacrificateurs ne pouvaient être choisis que dans une seule famille de
l'une des douze tribus, celle d'Aaron, un descendant de Lévi. Mais ce que Dieu
a dit, il l'accomplit tôt ou tard (1 Rois 8. 24 ; Rom. 4. 21). C'est
aujourd'hui chose faite : tous ceux qui ont mis foi en la personne et l'oeuvre
de Jésus Christ sont maintenant des sacrificateurs, sans distinction de race ou
de sexe. Ils forment une sacrificature royale, une nation sainte (1 Pi. 3. 9). Le besoin de
compagnie
Dès sa
naissance, l'enfant a besoin des soins d'une mère et d'un père pour assurer
son développement. En grandissant, il recherche très tôt la compagnie
d'autres enfants pour jouer. Un enfant normal n'aime pas la solitude. De même,
lorsque nous naissons à la vie spirituelle, nous avons d'abord besoin d'un
berceau spirituel et de soins attentifs. Avec les progrès spirituels, nous éprouvons
ensuite le besoin de compagnie. Si nous en sommes privés, et particulièrement
si c'est volontaire, notre âme est vite abattue. Un psalmiste décrit cette expérience
pénible : "Je me souvenais de ces choses, et je répandais mon âme
au-dedans de moi : comment j'allais avec la foule, et je m'avançais en leur
compagnie, avec une voix de triomphe et de louange, jusqu'à la maison de
Dieu,... une multitude en fête" (Ps. 42. 4). La vie chrétienne
normale se vit en communion avec d'autres enfants de Dieu. Dès le début de
l'histoire de l'Eglise, les premiers croyants ont ressenti ce besoin
fondamental. Un des premiers traits qui les caractérisaient était le désir de
vivre ensemble : "tous les jours ils persévéraient d'un commun accord
dans le temple" (Act. 2. 46). Le besoin
fondamental d'être ensemble a des causes profondes. Le but de Dieu sur cette
terre est de rassembler en un tous les enfants de Dieu dispersés (Jean 11. 52).
Son but pour l'éternité est de réunir en un toutes choses en Christ (Eph. 1.
10). Comme croyants, nous avons le même Père, la même vie, le même Esprit.
Nous appartenons à un même corps, celui de Christ. Ensemble avec Christ et en
Lui, nous jouissons de privilèges immenses : Dieu nous a vivifiés ensemble
avec le Christ, nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble
dans les lieux célestes dans le Christ Jésus (Eph. 2. 5, 6). Un seul troupeau
Le Seigneur donne
l'exemple du berger et de son troupeau pour nous enseigner comment nous devons
le suivre. Il n'y a peut-être pas d'image plus familière que celle du bon
Berger. Il marche devant ses brebis (Jean 10. 4). Quand elles se rassemblent
derrière lui pour le suivre, toutes peuvent le voir et entendre sa voix. Mais
si le troupeau choisit de marcher à la file, chaque brebis doit faire confiance
à celle qui la précède pour garder la direction, puisqu'elle l'empêche de
voir le berger. "Suivre comme un mouton" est malheureusement une réalité
quand les chrétiens suivent des hommes plutôt que de se rassembler autour du
Berger. Servir ensemble
Adorer (rendre
hommage) est le service le plus élevé que nous pouvons offrir à Dieu comme
croyants. Que Dieu nous accorde d'avoir "un même sentiment selon le Christ
Jésus, afin que, d'un commun accord, d'une même bouche, nous glorifiions le
Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ" (Rom. 15. 5, 6). Les vrais
croyants ne se rassemblent pas sur la base d'une doctrine, aussi juste
soit-elle, ou autour d'un homme. Pour les Juifs, l'objet central du culte était
l'arche de l'alliance avec le propitiatoire, une figure de la personne et de
l'oeuvre rédemptrice de Jésus. Aujourd'hui, le centre de rassemblement ne peut
être que le Seigneur Jésus Christ (Matt. 18. 20). Mais être
ensemble et même être rassemblés autour de Jésus n'est pas une condition
suffisante pour rendre culte en esprit et en vérité. Nous devons habiter
"unis ensemble". En apportant ensemble notre louange à Dieu, dans la
liberté que donne le Saint Esprit, nous réalisons, peut-être plus intensément
qu'à d'autres moments, combien l'unité des frères et soeurs est nécessaire :
"Voici qu'il est bon et qu'il est agréable que des frères habitent unis
ensemble" (Ps. 133. 1). Bien que chacun
ait reçu un service particulier avec la responsabilité personnelle de
l'accomplir, la parole de Dieu nous enseigne à servir ensemble pour mettre à
profit nos complémentarités (1 Cor. 12). Nous pouvons nous consoler, nous
encourager, nous corriger, nous exhorter mutuellement (littéralement
"appeler à côté de soi" (1 Thes. 5. 14), car chaque chrétien connaît
des moments de difficultés et d'épreuves. Même l'apôtre Paul avait besoin de
la foi d'autres frères pour être consolé (Rom. 1. 12). Ensemble, nous
sommes édifiés : "Qu'est-ce donc, frères ! Quand vous vous réunissez,
chacun de vous a un psaume, a un enseignement, a une langue, a une révélation,
a une interprétation : que tout se fasse pour l'édification" (1 Cor. 14.
26). Ensemble, nous
pouvons partager les fardeaux : "Portez les charges les uns des autres, et
ainsi accomplissez la loi du Christ" (Gal. 5. 2). Ensemble, nous
pouvons venir en aide aux faibles. Cette aide ne consiste pas à montrer sa
propre force, mais à la partager (Rom. 15. 1). Ensemble, nous
devons prier, d'autant plus que les réunions de prières sont souvent désertées.
Un journaliste demandait à un évangéliste très connu quelle avait été la
partie la plus ardue de son ministère. "La prière", répondit-il
sans hésiter. Les dangers
Plus les brebis
sont proches les unes des autres, plus nombreuses sont les causes de frictions
et de tensions. D'où les conflits qui prennent vite de l'ampleur quand on vit
dans un groupe. Satan hait l'unité des croyants et fait tout pour la détruire.
Comme un loup, il cherche à disperser les brebis pour mieux les dévorer (Jean
10. 12). Mais quand elles sont près du berger, c'est lui qui en assure la
protection. Un autre danger
est de transformer progressivement une assemblée en un groupe imperméable. L'établissement
de coutume, l'élaboration d'un vocabulaire particulier, le tissage d'étroits
liens de famille, etc., créent des barrières presque infranchissables pour
toute personne venant de l'extérieur. Dans une telle ambiance, un étranger se
sent mal à l'aise, même s'il est chaleureusement accueilli. Les portes de nos
assemblées doivent rester ouvertes à chacun (1 Cor. 14. 24, 25) et ce qui y
est enseigné devrait l'être comme si le monde nous écoutait. On peut aussi être
tenté de vivre sa vie à part, en dehors de la vie de l'assemblée, comme
certains "déréglés" chez les Thessaloniciens (1 Thes. 5. 14). Le
terme est emprunté au vocabulaire militaire. Le "déréglé" était
le soldat qui sortait du rang. Il ne s'agit pas d'une personne dont le
comportement est peut-être différent du nôtre, mais de quelqu'un qui refuse
de se tenir dans le rang. Il vit pour lui-même. Les causes de dérèglement
sont multiples : manque de soumission, mésentente avec les frères, désir de
se faire remarquer, refus d'une certaine ingérence des frères de l'assemblée
dans la vie personnelle, etc. Sans l'humilité, l'unité est impossible. La sainte cité
La parole de Dieu
émerveille toujours dans sa manière de relier les choses entre elles. Caïn,
le premier meurtrier, a aussi construit la première ville. La dernière vision
de l'apôtre Jean est celle de la sainte cité, Jérusalem, descendant du ciel
d'auprès de Dieu (Apoc. 21. 9-27). Cette ville n'est pas l'habitation de
l'assemblée, mais l'assemblée elle-même, l'épouse de l'Agneau. A l'aube de
l'humanité, Dieu avait déclaré: "Il n'est pas bon que l'homme soit seul.
Je lui ferai une aide qui lui corresponde". Son dessein sera accompli
lorsque Christ régnera avec son épouse. Jean contemple cette cité qui
resplendit dans toute sa magnificence, revêtue de la gloire de Dieu, lors du règne
de mille ans. L'Agneau l'illuminera de sa lumière. Ses portes ne seront pas
fermées, mais il n'y entrera aucune chose souillée. Ses seuls habitants seront
ceux qui sont écrits dans le livre de vie de l'Agneau. Des siècles
auparavant, un pèlerin arrivé aux portes de Jérusalem, le lieu de la
communion fraternelle, avait exprimé cette prière : "Que la paix soit
dans tes murs, la prospérité dans tes palais ! A cause de mes frères et de
mes compagnons, je dirai: Que la paix soit en toi" ! (Ps. 122. 7, 8). En
attendant le jour de gloire, que cet intense désir de paix soit le nôtre, à
cause de nos frères et de nos familles. En terminant,
posons-nous quelques questions :
M.
Horisberger |
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